Evangile selon Saint Marc, XVIe siècle
Fragment de manuscrit. Papier. XVIe siècle
Evangile selon Saint Marc, XVIe siècle
Fragment de manuscrit. Papier. XVIe siècle
Folio recto verso, portant des traces de réglure à la pointe sèche coté recto.
Cette page concerne le début du texte de l’Evangile selon Saint Marc, généralement précédé du portrait de l’Evangéliste.
Le premier verset comporte cinq lignes.
La première ligne débute par une lettre en forme de Lion ailé, symbole de Saint Marc, suivie de majuscules ornementées.
La deuxième et la troisième sont en majuscules erkat’agir, écrites à l’encre rouge puis jaune.
Les mêmes couleurs dans le même ordre se répètent pour les quatrième et cinquième lignes mais écrites en minuscules bolorgir.
La suite du texte, qui va jusqu’au verset 9 du chapitre, se poursuit au verso sur deux colonnes de 22 lignes en bolorgir à l’encre noire et comporte des signes de ponctuation et d’intonation. La surface écrite y est de 140mm x 200mm.
Cette première page de texte montre les éléments habituels que l’on retrouve au début des textes évangéliques. Ici, dans des tons de bleu, rouge et jaune, deux oiseaux affrontés surplombent le portique orné en son centre d’une rosace à huit branches et semé de motifs floraux réguliers, s’ouvrant sur un arc trilobé géometrique.
Dans la marge, sur toute la hauteur de la page, court un motif à base de bleu et de rouge terminé par une fine croix à son sommet.
Le texte commence par le mot « Skizbn » (Le commencement), le lion figure la première lettre « S ».
Le texte se lit : Skizbn/avétara ni y[isous]i k'[ristos]i orpês èv grial ê…. »Le commencement de l’Evangile de Jésus-Christ comme l’a écrit… ».
L’ensemble de ce décor, la stylisation sobre des formes et la précision du trait, apparentent ce fragment aux manuscrits du Vaspourakan des XVe et XVIe siècles.
La collection du musée possède un autre fragment du même manuscrit représentant un cadre de Table de canons inachevée, à la décoration très schématisée et simplifiée, incomplète de l’ordre des versets.
Edda Vardanyan
L’art du livre en Arménie est lié à l’invention de l’écriture. Jusqu’au Ve siècle de notre ère, les habitants du plateau arménien avaient successivement utilisé l’écriture cunéiforme (Ourartou), puis, au fur et à mesure des conquêtes, l’araméen (époque perse), le grec (période hellénistique et parthe) et les caractères latins (domination romaine).
Poussé par la nécessité d’avoir une écriture spécifique adaptée à la langue, un moine arménien, Mesrop Mashtots, inventa vers l’an 405 un alphabet composé de trente-six lettres ou graphèmes correspondant aux trente-six phonèmes de la langue orale utilisée au Ve siècle.
Le livre le plus diffusé et reconnu dans cette nation chrétienne, fut retranscrit en premier : La Bible.
Ceci permit l’apprentissage de l’alphabet par les nombreux copistes des monastères qui agirent comme un réseau de diffusion de la chrétienté renforçant par là même, l’identité arménienne. Cette transmission d’une culture et d’une religion permit de protéger l’identité d’une civilisation au-delà des vicissitudes de l’histoire.
Les textes furent au début, pour la plupart, de nature religieuse, bibliques (Bible-Evangiles) ou liturgiques (Lectionnaires-Hymnaires-Psaumes-Homéliaires, etc.).
À partir de la fin du IXe siècle, les multiples ouvrages crées dans les monastères, diffusent l'alphabet, la langue, la foi et la culture à travers l’écriture : et c’est l’union de la lettre et de la religion qui, malgré les atermoiements de l'Histoire lui supprimant régulièrement ses propres frontières, assureront la survie de ce peuple.
Pour agrémenter la lettre, le peintre prête son concours au scribe et c’est au travers du livre que nous avons la meilleure expression de l’art pictural arménien.
En 1511 apparaît le premier livre imprimé arménien, mais l’importance du manuscrit est telle que, au contraire des autres pays, l’impression de livres arméniens n’atteindra son plein développement qu’au XVIIIe siècle et ne pourra remplacer l’œuvre de la main avant le XIXe siècle.« Pays des Princes », cette vaste principauté puis ce royaume avant de devenir province byzantine, constituait l’Arménie historique du XIe au XVIIe siècle. Elle s’étendait du lac de Van aujourd’hui en Turquie, aux rives du lac d’Ourmia en Iran actuelle. Le territoire de l’ancien Vaspourakan est principalement en Turquie Orientale, au sud-est de l’Arménie d'aujourd’hui.